FEMMES À LA BARRE

Publié le par YCPF

Alors que plusieurs équipages du Yachting Club du Pays de Fontainebleau étaient engagés dans des régates de Ligue, d’autres disputaient une compétition bien dans l’air du temps et dont l’intitulé est à lui seul une profession de foi : « Femmes à la barre ».

Si la Fédération Française de Voile place cette année 2022 sous le signe du développement de la pratique féminine de la voile, l’YCPF organise depuis plusieurs années « Femmes à la barre ». Le principe de cette régate ? Les filles barrent les bateaux, les garçons occupent le rôle d’équipiers. Dans la plupart des sports, une telle mixité est impensable. Voyons-nous des matches de rugby mixtes, des équipes de bobsleigh mêlées, le tour de France cycliste couru par des teams mélangées ? Non bien sûr. Dans la voile, en revanche, la mixité ne constitue plus vraiment un sujet, pas même politique, encore moins polémique. Aux Jeux Olympiques, les séries mixtes sont nombreuses (Kiteboard, 470, Nacra 17), la course au large, à commencer par l’Ocean Race, exige une forme de parité et les « marathons » en solitaire, des transats aux Vendée, mélangent les genres depuis longtemps. Il y a plus de 30 ans, en 1990, Florence Arthaud gagnait la route du Rhum devant Birch, Poupon et Laurent Bourgnon, trois des plus grands marins de l’époque.

Si la voile est en avance sur les autres sports, l’YCPF n’est donc pas en retard et propose depuis plusieurs années des régates aujourd’hui affreusement qualifiées de « non genrées ».

Les barreuses de l'YCPF auprès de la 1ère adjointe de la mairie d'Avon.

Les barreuses de l'YCPF auprès de la 1ère adjointe de la mairie d'Avon.

N’ayant pas de sexe, le vent était neutre. Enfin presque…

Une femme à la barre, un homme en équipier, un dériveur ou un quillard pour support, tels étaient donc les ingrédients de cette compétition disputée par une canicule inhabituelle en mai. Sans oublier le vent (dit aussi « la brise »), lequel est neutre, n’ayant pas vraiment de sexe. Était-il angélique pour autant ? On dira seulement qu’il n’avait rien d’un ange-gardien, mais qu’il possédait un côté probablement exterminateur. Car c’est peu dire qu’en ce chaleureux dimanche, il en fit voir de toutes les couleurs aux équipages.

La régate fut marquée par du tout petit temps, en tout cas le matin. Et qui dit « tout petit » signifie souvent « défi à la logique » (ce qui rend la régate extrêmement tactique), augure de « renversement de situation » (ce qui a le don de mettre les nerfs en pelote des coureurs) et ou rien, même les positions les plus dominantes, n’est jamais (mais alors jamais) acquis.

En principe, la voile est une pure affaire de physique, de mécanique des fluides dont les causes et les effets sont scientifiquement évidents. Ce jour-là pourtant, en voyant deux voiliers, écartés latéralement de 25 m environ et suivant la même route parallèle vers la bouée sud, on ressentait une incompréhension, puis un malaise certain, avant de saisir que l’on assistait à un bug hors norme. Le bateau le plus proche de la rive gauche naviguait vent arrière alors que l’autre progressait au… près, soit vent dans le nez.

De la physique à la métaphysique

Dans ces cas-là, soit on se dit qu’on est victime d’une crise de démence plus ou moins sénile, soit on oublie les principes de base de la physique pour tenter de prendre les choses avec philosophie. Littéralement. Avec les penseurs grecs d’abord, qui l’ont ébauchée, puis avec les Allemands, à commencer par le grand Karl, qui ont développé l’explication. Le phénomène en train de se passer à ce moment-là sur la Seine, entre Sophie et Bleuenn, relève de cette vérité : ce qui fait progresser, c’est l’unité des contraires (le vent et la voile dans notre cas), laquelle crée « l’automouvement ». Peu importe d’où vient le vent, la tactique, le courant, les penons, l’âge de la capitaine et on en passe. On imagine malgré tout l’ambiance à bord, quand l’équipier doit dire à sa barreuse qui, la tête en l’air, s’escrime à remplir sa voile, baume à 90° de l’axe du bateau : « Je te préviens, Bleuenn est à notre droite, tribord amure, au près ». Sophie : « C’est bon Bernard, c’est pas drôle ». Bernard : « Je ne rigole pas ». Sophie : « Eh oh Bernard arrête ton char tu veux ?! »

Seine de crime

Affirmer que le vent usa les nerfs des skippeurs (des skippeuses, des skippeures ?) est peu dire. A l’arrivée de la deuxième manche, Alexandra glisse (tout) doucement vers la ligne d’arrivée, à 10 m devant. Elle compte environ 100 m d’avance sur sa concurrente la plus dangereuse. Elle a course gagnée. Cependant le vent tourne encore, faiblit si c’est possible, s’étiole, s’épuise, s’évanouit totalement alors que le courant, contraire, agit en sous-main, en sous-marin devrait-on dire. Le F15 d’Alexandra stoppe, puis commence imperceptiblement à… reculer. Elle est maintenant à 15 m du but, bientôt à 20 m. Arrive Camille. Le gréement en carbone de son proto se fond dans les feuillages à contre-jour et elle parait surgir de nulle part. En fait elle a pris un départ très prudent et revient du fond de la flotte. Alexandra poursuit son recul fatidique, Camille avance inexorablement. Maintenant elle est à la hauteur du F15, qu’elle laisse sur place. Dans quelques secondes elle va couper la ligne et apporter une première victoire à ce magnifique voilier. L’arrivée est à moins d’une longueur de bateau. « The flying fifteen is far, now it’s in the pocket » se dit Camille. Sauf que le vent qui l’a portée rend son dernier souffle. Le proto cale. A son tour, il recule. Il terminera dernier dans cette manche. Horreur d’une Seine de crime.

La régate par tout petit temps. Merci à Jean-Paul pour son aide.
La régate par tout petit temps. Merci à Jean-Paul pour son aide.
La régate par tout petit temps. Merci à Jean-Paul pour son aide.
La régate par tout petit temps. Merci à Jean-Paul pour son aide.
La régate par tout petit temps. Merci à Jean-Paul pour son aide.
La régate par tout petit temps. Merci à Jean-Paul pour son aide.
La régate par tout petit temps. Merci à Jean-Paul pour son aide.
La régate par tout petit temps. Merci à Jean-Paul pour son aide.

La régate par tout petit temps. Merci à Jean-Paul pour son aide.

À ce jeu où le calme (on parle de la psychologie des barreuses, pas de l’état du plan d’eau) est une arme décisive, Alexandra Lanciaux montera sur la plus haute marche du podium, suivie par Gwenola Pinvidic sur son Snipe et Sophie Marlot, armant le Touring du club. Elles avaient respectivement pour équipiers Laurent Dagommer, Cyriac Auriol et Bernard Brianchon. 

Les équipages du podium et toute l'équipeLes équipages du podium et toute l'équipeLes équipages du podium et toute l'équipe
Les équipages du podium et toute l'équipe

Les équipages du podium et toute l'équipe

La remise des prix, en l’occurrence de somptueux bouquets (pourquoi seuls les coureurs cyclistes auraient droit à des fleurs quand ils gagnent ?) était présidée par Françoise Bourdreux-Tomaschke, autre femme à la barre puisqu’elle est première adjointe de Marie-Charlotte Nouhaud, laquelle est bien sûr à la barre de la mairie d’Avon...

BCB

Françoise Bourdreux-Tomaschke, 1ère adjointe à la mairie d'Avon avec Sophie, Alexandra et Gwenola

Françoise Bourdreux-Tomaschke, 1ère adjointe à la mairie d'Avon avec Sophie, Alexandra et Gwenola

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article